samedi 15 novembre 2008

Les offres ANPE : panorama rapide d’un envoutant écosystème

Quand vous êtes chômeur depuis plus de 6 mois, vous commencez à vous dire que votre belle résolution de faire le point sur vous-même pendant 2-3 mois avant de recommencer à travailler commence à devenir aussi amusante que l’idée de voir Margaret Thatcher manger un kebab sauce blanche. Quoique, en fait je voudrais bien voir ça. Bon ben mettons que d’assister à un concert de Carla Bruni.

Commence à germer l’idée que « mais hostie de calice de saint sacrament, on dirait bien que je ne trouve pas de travail aussi vite que je le mériterai ! ». Certes, vous avez découvert des choses amusantes en 6 mois : déjà que votre travail n’existe pas à proprement parler (rapport au code Rome qui n’est pas très précis) et aussi qu’il existe des offres qui à mon avis sont créées par l’ANPE afin de faire rire la populace, un peu comme les jeux du cirque sauf que là c’est vous qui vous faites bouffer par les lions.

Vous avez découvert le vaste panorama des offres d’emploi : de celles qui ne correspondent pas à votre poste à celles qui ne veulent rien dire, celles qui visent haut et celles qui visent bas, à peu près au niveau de vos parties génitales histoire de vous situer le truc.

Déjà, sachez que si vous postulez à une offre de l’ANPE (j’en ris encore) c’est à vous de vous tenir au courant du processus. Petite précision, ce n’est pas parce que vous postulez que c’est transmis, c’est un peu comme les antibiotiques, c’est pas automatique. Un conseiller a été spécialement formé par le FBI afin de faire un tri alambiqué dans les lettres de candidatures. Après une longue étude, il juge de ceux qu’il peut transmettre à l’employeur et élimine les recalés d’un coup en biais sur les vertèbres cervicales. Si le temps passe et que vous commencez à vous intéresser à votre candidature (mais c’est bien connu en tant que chômeur on n’est pas pressés de retrouver du travail) il vous faut alors appeler votre agence en prenant avec vous le numéro justificatif de l’offre parce que sinon ils ne peuvent pas le retrouver ou alors seulement en soupirant et c’est toujours gênant de les embêter.

Si vous avez le numéro d’offre, on vous passe alors la personne en charge du dossier. Ou une autre. Parce que de toute façon il s’agit juste de vous annoncer avec un ton très assuré que c’est soit « en attente » soit que « l’offre n’existe plus ». Vous, petit malin, vous vous doutez que si l’offre n’existe plus c’est que soit quelqu’un a été engagé soit que l’employeur a retiré l’offre. Faites alors ce test amusant : posez la question au conseiller ANPE. Sauf nouvelle recrue vous obtiendrez la réponse suivante : il n’en sait strictement rien, rapport au fait que « ce n’est pas marqué dans l’ordinateur parce que l’offre n’existe plus ». Ben oui, c’est ballot.

Pourtant, certaines offres méritent un suivi particulier. Il y a par exemple celles qui sont largement en dessous de vos compétences (ou du moins le pensez-vous) comme réceptionniste ou vendeuse de chaussures pendant l’été histoire de remplacer les Birkenstock des touristes allemands par des Havaianas qui sont vachement plus fun pour les pieds rapport au fait que c’est brésilien. Vous pensez pouvoir réussir à gérer ces lourdes tâches ? HAHA mais jeune freluquet, avez-vous seulement les bons diplômes ?? Car oui, pour vendre des chaussures, il faut un BTS vente EXIGE et 3 à 4 ans d’expérience minimum. Sûrement pour bien maîtriser la déclinaison des produits en différentes tailles (« attention 36 est plus petit que 42, Monsieur, attendez laissez-moi faire je suis une professionnelle, vous faites quoi comme pointure ? 43 ? Je vous propose donc une paire taille 43, dites moi si ça va »). Et si vous n’avez pas les diplômes et expérience exigés, même pas la peine d’espérer, votre lettre est jetée.

Détail amusant j’ai vu passer plusieurs offres de vendeuse en chaussures avec jusqu’à 10 ans d’expérience exigés. A mon avis il fallait aussi savoir ranger les boîtes et maîtriser le chausse-pied mais là ils abusent ça pousse la qualification trop loin.

Sinon, rassurez-vous, la situation n’est pas complètement désespérée. Il y a en effet les offres qui vous sont personnellement adressées par votre conseiller chéri : celles qui correspondent à votre code Rome et sont dans votre secteur de résidence. Alors oui, on le sait, votre code Rome est bien vaste mais votre conseiller est là pour veiller au grain. Ainsi, après un Master de Projets Culturels et de l’expérience dans un musée, j’ai reçu l’ordre de postuler à un travail dans le secteur de « l’économie agricole » avec la spécialité « agriculture de moyenne montagne ». C’est ma faute, j’ai bossé dans la culture mais je n’avais pas précisé que ça excluait le blé et le maïs, bien fait pour moi.

Il y a aussi les offres mystère. Ce sont mes préférées, elles me rappellent les bonbons super acides qu’il fallait garder dans la bouche jusqu’au bout alors que, soyons honnêtes, ça n’en valait pas la peine. Par exemple : « Chargé(e) de communication » dans le secteur « Brasserie/Bar ». Personnellement j’ai été très intriguée par cette offre, au point que j’ai décidé d’appeler l’ANPE afin d’en savoir plus. Après information, il s’est avéré que c’était un poste de chargé de communication pour une brasserie. Oui, ils sont comme ça à l’ANPE, ils savent vous lire une offre. Pas de chichis, hop, tout est dans l’ordi. Si vous insistez en disant « mais quand même, pour communiquer quoi, pour une brasserie ? » vous aurez la réponse classique « ben pour communiquer, quoi. ». Oui, ils sont mignons. Si vous demandez le nom du responsable, ou simplement de l’agence, refus automatique : ils n’ont pas le droit de vous le transmettre. Sans doute pour éviter le harcèlement du responsable par les hordes de demandeurs d’emploi crasseux ou alors pour éviter la concurrence à leur agence, je ne sais pas. Moi, amusée par le truc, j’ai postulé. Après quelques semaines je suis passée pour demander des infos sur ma candidature. J’ai alors eu la joie d’entendre « ah cette offre ? Non mais c’était n’importe quoi, c’était pour faire serveuse ».

Voilà. Notez qu’apparemment je n’ai pas non plus été choisie comme serveuse, il fallait sûrement une licence en « prenage de commandes » option « nettoyage de verres » et malheureusement j’ai arrêté mes études trop tôt.

lundi 3 novembre 2008

2ème rdv : l'ANPE contre-attaque

J’avais fait mon 1er rdv, j’avais rencontré ma conseillère, j’allais découvrir le suivi mensuel. Qu’est-ce que le suivi mensuel pour ceux qui n’ont pas la chance d’y avoir droit (heureusement ils sont de moins en moins nombreux) ? Analysons ensemble les termes : « suivi mensuel ». 2 mots, 5 syllabes. 4 syllabes si vous mâchez un peu le tout.

« Suivi » est un terme qui peut avoir plusieurs définitions. Notons déjà qu’il vient du verbe « Suivre », verbe transitif du 3ème groupe donc à classer dans la catégorie « oh mon dieu comment ça va se conjuguer ça encore ? ». Suivi peut être un adjectif, un nom masculin et un participe passé. Pour le coup c’est le nom masculin qui nous intéresse. « Suivi » signifie : « surveillance permanente d’une personne, d’une chose ou d’un projet sur une période prolongée ».

« Mensuel » est un adjectif qualificatif (ça peut aussi être un nom comme dans « Tu sais, au fond, Truite mag est un excellent mensuel ») qui signifie : « qui a lieu tous les mois ».

« Suivi mensuel » peut donc se traduire par « surveillance permanente d’un chômeur sur une période prolongée vu qu’il ne va pas trouver du boulot facilement, sauf qu’on le verra une fois par mois seulement ». Si comme moi vous tiquez sur la dichotomie flagrante entre permanente et une fois par mois, faites comme moi, n’y pensez pas trop, ça sert à rien de réfléchir à ce genre de trucs, ni même de réfléchir du tout, c’est pas comme ça qu’on trouve du travail.

Le suivi mensuel est donc le moyen qu’ont trouvé l’ANPE et votre conseiller pour vous revoir tous les mois, à ce niveau là, moi j’dis, c’est que vous avez un ticket avec, ils arrêtent pas de vous relancer.

Si j’en crois l’ANPE « Votre conseiller référent fait le point avec vous sur l’avancée de vos démarches de recherche d’emploi. Il vous apporte appui et conseils pour accélérer votre retour à l’emploi et construit avec vous le plan d’actions qu’il vous appartient de réaliser (contacts entreprises, participation à des ateliers, évaluation de vos compétences ...). Votre conseiller référent est votre interlocuteur pendant tout le suivi de votre recherche d’emploi. Avec lui, vous analysez les résultats de vos démarches et définissez les actions à conduire. A la fin de chaque entretien, il vous informe sur les modalités du prochain contact. »

Moi à ce niveau-là je voyais déjà ma conseillère teinte en blonde et sautillant devant un micro en couinant « Je serai làààà, Toujours pour toiiiiii ! N'importe où quand tu voudraaas ! Je serai, toujours la mêêême, un peu bohèèèème, Prête à faire des folies, Je serai, même si la vie, nous sépare, Celle qui te redonnera l'espoir, On ne laissera rien au hasard, Car tu sais que je resterai
ta meilleure amie !!!! ».

Les paroles sont de Lorie, ou alors de quelqu’un d’autre qui n’a pas eu le courage de signer cette œuvre qui permet pourtant aux petites filles de 8 ans de découvrir la poésie, l’amitié, le goût pour le rose et le sautillement anarchique pour notre plus grand bonheur.

Moi, comme je vous l’ai déjà raconté, ma conseillère m’avait déjà vachement aidée niveau appuis et conseils alors autant vous dire que j’attendais avec impatience le 2ème rendez-vous.

Pour l’occasion j’avais pris avec moi mon CV et toutes mes lettres de motivation que j’avais envoyée depuis le mois d’avant.

Le jour J, j’entrai dans son bureau sans porte (c’est comme un open space mais c’est nettement plus convivial et professionnel tout en gardant le côté « que chacun puisse écouter ce qui passe ici et le récit de cette chômeuse afin de mieux la lyncher en place publique par la suite »). Ma conseillère n’était pas teinte en blonde et elle n’avait pas franchement l’air de vouloir être ma meilleure amie. Déjà parce qu’une amie aurait su qui j’étais, pour commencer. Là j’ai eu :

« - On a rendez-vous ?

- Ben oui, j’ai reçu une convocation.

- Ah. Faites voir, que je vois qui vous êtes avec votre numéro.

Tapage sur le sacro-saint ordinateur pendant que je reste debout.

- Ah oui, je vois, bon ben vous êtes autonome, vous, non ? Bon, on se voit le mois prochain alors. Enfin, non, le mois prochain c’est Juillet, on est fermés. Août alors.

- Il se peut que je parte quelques jours…

- Bon ben Septembre alors ! De toute façon on vous convoquera ! »

Fin du 2ème rendez-vous. En accueil j’ai mis 2/10, en chaleur/ambiance 7/10 parce que je n’ai vraiment pas eu le temps de m’ennuyer même si elle avait un peu mobilisé la parole et en déco j’ai mis 3/10 parce qu’aucun effort n’avait été fait, à peine un pot de crayons posé sur le coin du bureau, et même pas de personnage rigolo dessus ou une phrase genre « Vivement la quille !!! ».

Bilan général : vous l’avez compris, en juillet, on ne cherche pas de travail, c’est les vacances. Niveau suivi, appuis et conseils ben on ne peut pas dire qu’elle était mauvaise, hein, vu qu’elle ne l’avait pas évoqué. Niveau suivi personnalisé, je pense qu’on peut difficilement faire pire (quoique ne les sous estimons pas) et niveau suivi mensuel, ben… on va dire « peut mieux faire ». En tous cas y’avait de quoi rester motivée…

Et merde, je vais avoir « Ma meilleure amie » en tête toute la journée…